Le confinement de deux hyperactifs

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Pierre-Philippe Côté et Véronique Vigneault, ces deux grands visionnaires débordant d’énergie, nous donnent leur point de vue sur la réalité et les impacts du confinement et de la crise de la COVID-19.

*Nous avons fait cette entrevue téléphonique au 40e jour du confinement.

Pilou et Véro, qu’est-ce que le confinement a changé pour vous ?

: Je ne peux plus voyager et je ne peux plus faire de spectacles. Mais, pour une fois, je peux passer du temps en famille à la maison. Je m’étais fait un setup pour pouvoir travailler chez moi, mais j’étais toujours parti ailleurs. Le confinement me donne le temps de me poser.

V : Je m’ennuie beaucoup du contact humain avec la famille, les amis et les collègues. Au niveau de l’organisation du travail pour Le BEAM, ça ne change pas grand-chose. Considérant le fait qu’on couvre l’ensemble du territoire de l’Estrie et que j’habite Sherbrooke — et non Saint-Adrien — je travaillais déjà beaucoup en télétravail. Par contre, le télétravail avec 3 enfants à la maison, ça change un peu la dynamique, l’efficacité et la disponibilité. Mais il y a quelque chose de positif : j’aime beaucoup suivre mes enfants dans leur apprentissage scolaire. J’adore faire l’école à la maison, même si je suis un peu trop motivée !

Dans un monde idéal, quand se terminerait ce confinement ?

P : JAMAIS ! (Pilou et Véronique rient) Je suis trop bien ! En fait, il faudrait seulement avoir le droit de sortir pour les tournages (encore des rires !)

Lundi matin, 10 h: la réunion hebdomadaire du BEAM (absente sur la photo: Fallon Dubois). Pierre-Philippe assiste à la réunion tout en s’occupant de ses semis!

Lundi matin, 10 h: la réunion hebdomadaire du BEAM (absente sur la photo: Fallon Dubois). Pierre-Philippe assiste à la réunion tout en s’occupant de ses semis!

Ce serait bien d’avoir un déconfinement sectoriel et une reprise des activités économiques assez rapidement pour pouvoir, entre autres, finir les travaux [à l’église de Saint-Adrien].

V : J’aimerais qu’on puisse reprendre une vie normale en mai ou juin pour pouvoir profiter de notre été de tournages et des nombreux projets qui s’en venaient pour Le BEAM et ses membres. Ce serait mon contexte idéal, mais je doute que c’est ce qui va arriver… Alors on devra s’organiser avec la réalité.

Vous semblez en ce moment, vivre une période très créative. Est-ce le confinement peut être un moteur de création ?

 V : Oui. Pilou et moi sommes deux personnes qui imaginons ce qui n’est pas là et qui essaient de développer de nouvelles idées et projets. Mon implication sociale a toujours été importante et l’est encore plus en temps de crise. Je sens que j’ai un rôle à jouer. Je suis stimulée par la nouveauté, par le fait de devoir réinventer. D’un point de vue social, environnemental et politique, on était rendus là. Il fallait revoir nos façons de faire. Pour moi, l’aspect positif de cette crise c’est qu’on va pouvoir s’y mettre sérieusement et collectivement.

P : C’est dans des crises comme celle-là que nous sommes appelés à nous renouveler et à changer de paradigmes. Il y a beaucoup de place à l’innovation parce que rapidement, on a besoin de solutions pour des problèmes bien réels. Moi, ça m’a donné l’occasion de prendre du recul en restant à Saint-Adrien pendant les 35 derniers jours, confinés chez nous. Ça m’a permis plus de peaufiner la vision locale que j’avais de nos activités et de ce que je fais dans la vie. La consommation, la cocréation, l’achat « local » sont sollicités plus que jamais.

 Comment pensez-vous que la situation actuelle influencera l’industrie de la culture ?

P : L’industrie de la culture est très touchée, tout en étant assez sollicitée. Le BEAM peut jouer un rôle important en aidant le milieu et en trouvant des moyens de créer du contenu. Il faut le voir comme une opportunité.

Pierre-Philippe et sa fille Éléonore en visite au BEAM pour s’assurer que tout se passe bien. Ils en profitent pour jouer sur l’orgue Casavant 1924, prochainement restoré. @Pierre-Jean Moreau

Pierre-Philippe et sa fille Éléonore en visite au BEAM pour s’assurer que tout se passe bien. Ils en profitent pour jouer sur l’orgue Casavant 1924, prochainement restoré. @Pierre-Jean Moreau

: Il y a un grand impact pour la culture et le domaine de l’audiovisuel, mais dans cette industrie, les gens sont super créatifs et habitués de s’adapter. Ce sera une opportunité pour les gens de se démarquer et de se repositionner. Certains aspects qui ne fonctionnaient plus dans cette industrie pourraient se transformer, notamment le financement des films au Québec et au Canada. On sera obligés de se réinventer…

Selon vous, à quoi ressembleront les tournages après le confinement ?

P : On se pose tous des questions : comment fera-t-on pour tourner des scènes avec des acteurs à deux mètres de distance ? Quelle compagnie d’assurance va vouloir assurer les tournages ? Je pense qu’une solution serait de tester tous les membres de l’équipe de tournage chaque matin. Et ensuite, imposer un confinement à l’équipe pour la durée du tournage. Une fois le tournage terminé, on se « déconfine ». Si personne ne voit des gens de l’extérieur, il n’y aura aucun problème.

J’ai bien espoir aussi que les équipes vont se réduire. On peut être innovants au BEAM, en créant des petites équipes de tournage hyper agiles, où il y a des gens multitaskers. Ça deviendra essentiel de le faire parce que le confinement et les règles de sécurité l’obligent. C’est ce que j’ai dit quand j’ai parlé avec Téléfilm et la SODEC. On essaie de trouver des moyens de tourner avec des équipes réduites, en augmentant la polyvalence des gens.

Et Le BEAM pendant cette crise ?

Routine du matin… Véronique répond à ses courriels en coloriant des princesses avec sa fille et en aidant ses fils en maths et en anglais.

Routine du matin… Véronique répond à ses courriels en coloriant des princesses avec sa fille et en aidant ses fils en maths et en anglais.

V : Pour le BEAM, la collaboration et la complémentarité des ressources, c’est vraiment central. Ceux qui sortiront grandis de cette crise sont ceux qui seront capables de travailler en collaboration, sans essayer d’aller chercher une plus grosse part de gâteau. Au BEAM et en Estrie, j’ai l’impression que nos membres vont plutôt essayer de se séparer le gâteau pour que tout le monde puisse se nourrir et de développer la recette pour en faire plus. Nos travailleurs sont capables de sortir plus forts de tout ça et c’est ce qui me stimule à continuer notre travail et de rêver l’après-crise!

Réservez-vous quelque chose aux membres du BEAM après la crise ?

V : OUI ! Regardez bien le prochain 5 à 7 ! On fait présentement des rencontres virtuelles. Mais on a hâte de voir tout le monde, de voir où en sont rendus les projets et comment on peut avancer ensemble.

Il y avait beaucoup de tournages et de projets à l’agenda pour cette année. Ils devront être remis, mais on a espoir qu’ils ne seront pas annulés et que nous aurons une année 2020-2021 encore plus dynamique et stimulante.

Le mot de la fin…

P : On a plein de projets en création et nous vous tiendrons au courant via la page Facebook. N’hésitez pas à l’utiliser et à la consulter !

V : On sait que ce n’est pas facile en ce moment. Mais ça peut aussi être un moment stimulant. Toute l’équipe travaille encore à temps plein et nous sommes là si vous avez besoin de nous.

 Nous serons prêts quand tout recommencera !