Portrait de Pilou, porteur de projets rassembleurs

Véritable aimant à projets, Pilou est comme un poisson dans l’eau dans le studio du Sanctuaire 5.1 au BEAM.

Véritable aimant à projets, Pilou est comme un poisson dans l’eau dans le studio du Sanctuaire 5.1 au BEAM.

Un porteur de projets nommé Pilou

Comment décrire Pierre-Philippe Côté (alias Pilou, alias Peter Henry Phillips)? À la fois réalisateur, compositeur de musique de film, auteur-compositeur-interprète, chanteur, multi-instrumentiste, producteur, entrepreneur, père, amoureux et fier citoyen de Saint-Adrien, il est porteur d’un projet rassembleur aux visées culturelles, sociales et économiques à échelle humaine : le BEAM.

De la contrebasse à la composition en passant par la réalisation 

Pilou à la guitare dans cette captation en direct de la chanteuse Georgette, filmée dans l’église.

Pilou à la guitare dans cette captation en direct de la chanteuse Georgette, filmée dans l’église.

Entre les mélodies de sa mère au piano et les chansons interprétées par son père, l’enfance de l’artiste polyvalent baigne dans la musique classique et la chanson française. Formé en contrebasse au Conservatoire de musique de Montréal, le jeune Pilou évolue dans un milieu où le classique s’acoquine avec le rock, le pop et le folk, et côtoie autant l’univers orchestral que les jams. Diplôme du Conservatoire fraîchement en poche, Pilou part en tournée avec Jorane. La suite foisonne de rencontres musicales enrichissantes, que ce soit avec Ariane Moffatt, Navet Confit, DJ Champion, Lewis Furey, Elisapie, Philippe Brach, Ines Talbi ou David Giguère. Il signe les trames sonores des films Le règne de la beauté de Denys Arcand et Les Affamés de Robin Aubert, et livre ses propres chansons comme auteur-compositeur-interprète sous le pseudonyme Peter Henry Phillips. On l’aura compris, Pilou est un véritable touche-à-tout, et tout ce qu’il touche semble lui réussir.

En 2010, après un voyage en Chine, où il accompagne Marie-Jo Thério à l’Exposition universelle, il regagne la métropole, encore imprégné de l’effervescence, de la lumière et de la foule de Shanghai. Aussitôt débarqué à Montréal, il est frappé par l’évidence : la suite ne se passera pas en ville.

 C’est la grande aventure qui commence.

Un retour aux sources en Estrie 

Geneviève et Pilou, deux forces fraîches pour leur communauté. ©Pierre-Jean Moreau pour Écho Vedettes

Geneviève et Pilou, deux forces fraîches pour leur communauté. ©Pierre-Jean Moreau pour Écho Vedettes

Avec son amoureuse, la comédienne, artiste peintre et propriétaire de la Galerie G de BR, Geneviève Boivin-Roussy, il quitte la ville pour poser ses pénates à Saint-Adrien, charmant village lové entre les montagnes, tout près de Val-des-Sources (anciennement Asbestos) où il a grandi. L’appel de la nature, le calme, l’espace pour créer et les paysages bucoliques charment le couple, qui intègre le projet domiciliaire Espace nature de la municipalité et construit sa maison sur un terrain de 16 acres. Atelier de peinture, Studio Le Nid, salle de spectacles La Meunerie, épicerie zéro déchet en libre-service Le St-Vrac : les projets s’enchaînent aussitôt à Saint-Adrien et ne cessent de se multiplier, jusqu’à l’achat de l’église du village, sa rénovation et la naissance du BEAM. Et c’est loin d’être terminé!

Le domaine des Côté-Boivin-Roussy dans la campagne adriennoise. ©Karolina Krupa - Lecampdebase.eco

Le domaine des Côté-Boivin-Roussy dans la campagne adriennoise. ©Karolina Krupa - Lecampdebase.eco

Le rêve de Pilou fait des petits. « Des amis et des collègues qui travaillaient dans le domaine du cinéma et de la télévision à Montréal sont venus passer des week-ends chez nous à la maison, et ils ont vu qu’on réussissait à travailler dans notre milieu, à construire notre emploi en habitant ici. Il y en a pas mal qui ont eu la piqûre et qui ont décidé de nous emboîter le pas. » Le secret du pouvoir rassembleur de l’artiste? Un projet porteur d’espoir, une volonté à toute épreuve et le désir contagieux de transformer les régions par la culture et l’innovation. 

Un écrin pour cultiver la créativité en région

L’aboutissement d’un grand rêve : la revitalisation de l’ancienne église du village. ©Karolina Krupa - Lecampdebase.eco

L’aboutissement d’un grand rêve : la revitalisation de l’ancienne église du village. ©Karolina Krupa - Lecampdebase.eco

Le BEAM naît d’un besoin. Des gens du milieu de la télé et du cinéma souhaitant tourner dans la région communiquent avec le réalisateur-compositeur et lui demandent son aide pour repérer des lieux de tournage. Par la force des choses, Pilou se retrouve donc à endosser le rôle de fixeur pour des productions et même de producteur exécutif pour des vidéoclips. « J’ai croisé celle qui allait devenir ma partner, Valléry Rousseau, sur le parvis de l’église, et elle m’a dit qu’elle pensait retourner à Montréal pour reprendre son travail en production. Je lui ai dit “Je pense qu’il y a une possibilité de développer ça ici. Je reçois plein d’appels. Ça te tente-tu qu’on parte quelque chose?”» Environ un an plus tard, le BEAM voit le jour. 

L’objectif de l’organisation : mettre en valeur les travailleurs de l’industrie culturelle de la région et toute la richesse de l’Estrie. Terminée l’étiquette péjorative d’art régional accolée aux produits artistiques créés hors métropole. Le BEAM démocratise l’art, donne accès à des infrastructures de calibre international à des gens en région et ouvre ses portes à des productions de grande envergure. En créant un hub créatif, Pilou aspire à faire tomber les murs de verre entre les secteurs d’activités, à décloisonner les différentes spécialités pour que tous profitent des idées de chacun, à rendre des expertises disponibles et à créer un bassin de collaborateurs. Des ressources matérielles et humaines inestimables pour quiconque souhaite mener son projet à bien.

Un projet rassembleur pour toute une communauté

Toute une communauté mobilisée autour du projet de revitalisation de l’église.

Toute une communauté mobilisée autour du projet de revitalisation de l’église.

Au centre des préoccupations de Pilou, la Culture avec un grand C. Le BEAM regroupe autant des artistes que des ingénieurs, des citoyens, des agriculteurs. « La culture, c’est un mode de vie, affirme Pilou. Ça inclut la souveraineté alimentaire et l’innovation sociale. J’ai le rêve que le hub créatif devienne un hub agri-culturel. De la ferme à la table à la scène! » 

Ses projets favorisent la collaboration entre toutes les générations et la participation de chacun, des enfants jusqu’aux aînés, pour que toute la communauté en tire du positif et que la société devienne plus équitable. « Mon but ultime, c’est d’arrimer la rigueur économique de la droite à la sensibilité et au sens de la justice sociale de la gauche pour réussir à créer une culture rentable favorable à la formation de citoyens qui participent à la vie communautaire, à la vie sociale et à la prospérité de leur communauté. On sait que la culture est un moteur économique important; il ne faut pas avoir peur de faire de l’argent! Économie sociale ne veut pas dire pauvreté. Économie sociale veut juste dire que personne n’est laissé derrière et qu’on met en place des mécanismes pour que dans 20, 30, 40 ans, les inégalités sociales soient moins importantes. » 

Réduire son empreinte écologique

En visitant des plateaux de tournage, Pilou prend conscience de la quantité effarante de vaisselle jetable, de bouteilles d’eau et de verres en styromousse. Un choc pour celui qui a à cœur le développement durable. « Il y a tellement de gaspillage, que ce soit de la nourriture ou des matières jetables. J’ai voulu faire quelque chose. » Dorénavant, la production de tous les tournages accueillis à Saint-Adrien doit engager un traiteur zéro déchet. En contact avec les instances gouvernementales, les idées du BEAM font leur chemin, et la SODEC offre maintenant des crédits d’impôt pour les plateaux verts. 

Comment élargir les initiatives vertes? En sensibilisant les gens, en brusquant certaines habitudes et en s’attaquant au statu quo. « Se faire servir dans des assiettes en styromousse parce que “c’est de même”, ça n’a pas de sens. Comme tout le monde, j’en échappe, je ne suis pas parfait, mais notre but est d’accélérer la transformation de notre société, et pour ça, il faut aller vers des solutions plus vertes. On ne peut plus accepter le statu quo. Au rythme où vont les choses, si on ne change pas nos habitudes, on va frapper un mur. »

Le compositeur et réalisateur en action au Sanctuaire 5.1 ©Chedly Bouzouaia

Le compositeur et réalisateur en action au Sanctuaire 5.1 ©Chedly Bouzouaia

Un rêveur en action

Pilou carbure aux rêves et n’hésite pas à se mouiller pour les réaliser. Loin de demeurer la tête dans les nuages, il ramène ses idéaux au plancher des vaches pour les concrétiser. « Quand je suis parti il y a 9 ans, que j’ai annoncé aux gens que je déménageais à la campagne et que j’ouvrais mon studio, tout le monde m’a dit que j’étais fou et on me prédisait une faillite en six mois. Cette année-là, j’ai construit trois maisons en autoconstruction – ma maison, mon studio et l’atelier – et j’ai quintuplé mon chiffre d’affaires. Quelques années plus tard, tout le monde dit “Ouain, dans le fond y’avait raison, c’est l’fun la campagne!” Moi, c’était mon rêve. Et quand j’ai une idée en tête, je ne l’ai pas dans les pieds : les bottines suivent les babines! » 

Vous souhaitez en apprendre davantage sur le BEAM, rejoindre le hub ou réaliser un projet avec nous? Écrivez-nous!

Propos recueillis par nos membres Lavinia Botez, Donat Béland de Bubbly & de Pop Culture numérique